Maïram Guissé | 17 Mai 2015, 18h52 |
Gardiens d’immeubles. Christophe, Jean-Marc et
Philippe le sont depuis au moins dix-neuf ans pour le bailleur Ab-Habitat
(Ab-H). L’office en compte 90 - dont la moitié de fonctionnaires -
sur un patrimoine de 11 000 logements répartis sur les communes d’Argenteuil et
Bezons.
« Cela fait partie de notre politique de proximité »,
insiste Philippe Rêve, le directeur général. Tous sont logés dans des
appartements de fonction sur leur lieu de travail. Pour combien de temps ? «
Nous risquons de perdre nos logements au 1er septembre 2015, lâche désabusé
Christophe, 57 ans, en poste depuis 23 ans à Argenteuil. On nous demande, en
tant que fonctionnaires, de payer le loyer et/ou les charges ». Ses collègues
Jean-Marc et Philippe, rencontrés à Bezons où ils travaillent depuis 19 et 20
ans, sont aussi inquiets. « Nous touchons un peu moins de 1 500 € avec notre
ancienneté, insistent-ils. Imaginez si on se retrouve à payer ne serait-ce que
des charges, ce n’est pas gérable ». Certes, Christophe est devenu gardien « au
hasard ». Mais depuis il est toujours là, « parce qu’il aime être en contact
avec les habitants ». « Nous, c’est le logement de
fonction qui nous a attirés », concèdent Jean-Marc et Philippe. « C’est
clairement un argument pour recruter du personnel, assure Philippe Rêve. Il
faut dire que ce n’est pas un métier facile. » Les trois collègues le savent
bien. « C’est un travail éprouvant, on est toujours sollicité, nous et nos
familles par le fait de vivre sur place, souffle Christophe. Plusieurs fois mon
garçon m’a dit qu’il en avait marre d’être le fils du gardien ». Celui-ci ne
manque jamais d’humour. C’est sa recette pour désamorcer les conflits avec les
locataires. « Habiter sur place ce n’est pas évident, glisse Jean-Marc. À 17
heures quand notre journée est censée se terminer, elle continue car les gens
nous appellent systématiquement. Nous sommes de véritables relais. Sur place,
lorsqu’il y a des soucis, même de sécurité, nous sommes les premiers appelés,
avant même le 17(NDLR : le numéro de la police). » Sur chaque
intervention, ils ne savent jamais comment les choses vont se passer. « Une
fois, je venais pour une dispute dans un appartement, raconte Christophe. Ça
criait très fort, deux personnes se battaient au couteau, j’aurais pu prendre
un coup ». Pour autant, ils insistent sur l’importance de vivre dans la cité. «
C’est un plus, martèlent-ils tous les trois. Si on venait de l’extérieur, on ne
serait pas accepté de la même façon par les gens. Là, le lien se crée car nous
sommes comme eux. » Un point de vue partagé par la CGT,
le syndicat majoritaire. « Ils ont une utilité de service public, insiste
Cécile Sellier, de la CGT. Vu leur faible salaire, ils ne peuvent pas payer des
charges qui peuvent aller jusqu’à 300 €. » Et des inégalités entre les salariés
seront inévitables. « La moitié de nos gardiens relèvent du droit privé, eux
pourront garder leur logement de fonction, mais pas les autres qui sont
fonctionnaires », regrette Philippe Rêve. Direction d’Ab-H, gardiens, syndicat,
tous parlent d’une même voix pour que les logements de fonction soient sauvés.
Contacté
à plusieurs reprises, le ministère du Logement n’a pas répondu à nos
sollicitations.
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